L’Opposition Research, nouvelle arme politique ?

  L’Opposition Research, nouvelle arme politique ? par Franck Confino et Céline Letellier L’Opposition Research consiste à recueillir, par quelque moyen que ce soit, un maximum d’informations susceptibles de nuire à l’image d’un adversaire politique. Recours aux vidéos sauvages, traque, provocation etc… Portrait d’une tendance venue d’Outre-mer, qui épargne encore l’Hexagone. Vous vous souvenez de la triste affaire du sénateur américain Georges Allen ? En août 2006, devant une poignée de sympathisants, celui-ci avait pris à partie un vidéaste démocrate et, se laissant aller à “l’intimité” de son auditoire, l’avait traité de “macaque”. La vidéo, qui avait tourné en boucle sur Youtube, accompagna la fin de carrière politique de cet ex-présidentiable… Reste à savoir si elle en fut la cause directe – certains comme Versac défendent le contraire. Quoi qu’il en soit, cette notoriété assistée était l’une des premières manifestations d’Opposition Research. Essentiellement pratiquée aux Etats-Unis, cette nouvelle forme de “chasse à l’homme” exploite les facilités de la vidéo sur internet, support de démonstration explicite par excellence et qui se passe volontiers de relais.  Dans un staff de campagne municipale, une seule personne sera spécifiquement chargée de l’Opposition Research. C’est une autre affaire pour les Présidentielles… Avec un tel enjeu, on ne lésine pas sur les moyens et ce sont plusieurs dizaines de personnes qui seront chargées à temps complet de suivre les opposants, de fouiller dans leurs vies pour découvrir de quoi détruire leur image auprès du public. Si l’on en croit Exprimero.fr, une quarantaine de personnes constituait une cellule d’Opposition Research pour les candidats Kerry et Bush lors des dernières élections présidentielles.  Espions professionnels Au cours des dernières années, la démarche s’est ainsi “professionnalisée” : les informations ne sont plus recueillies à la sauvette par de simples opposants amateurs mais font l’objet d’un service proposé par des entreprises aux acteurs politiques. Les informations récoltées par ces nouveaux espions sont réutilisées pour ce qu’il conviendrait d’appeler de la propagande plutôt que de la publicité… Agissant en sous-main, ces cabinets ne sont, la plupart du temps, pas clairement identifiables et entretiennent le flou sur leur organisation. Les médias, tremplins du lynchage L’enjeu ne réside donc plus non seulement dans le fait de détenir de telles informations mais bel et bien de convaincre les medias de les utiliser. Attentifs aux exigences de l’audience, certains ne se font pas prier et se font volontiers les commissaires de la curée. Si les journaux et télévisions nationales respectent davantage la notion de déontologie de l’information, Internet profite du couvert de l’anonymat pour se faire le média du scandale. Les sites de partages comme YouTube ou encore DailyMotion deviennent d’excellents tremplins pour la rumeur. Ségolène Royal en a fait les frais quelques jours avant les primaires du Parti Socialiste : un “entretien exclusif” et posthume de l’éminent sociologue Pierre Bourdieu apportait “la preuve” que la candidate du PS était de Droite. Bourdieu Segolène Droite Gauche Construire l’image la plus noire possible A l’instar de “Ségolène et les profs“, sorti quelques temps plus tard, il s’agit le plus souvent d’informations recueillies hors de la sphère publique ou en “comité restreint”… et donc très prisées du grand public. Pour les campagnes les plus sophistiquées, il s’agira non plus de distiller quelques informations nuisibles tous azimuts mais de construire une image globale la plus noire possible. Les pratiques d’Opposition Research prennent place dans un contexte où l’acteur politique n’est plus jugé sur son seul programme mais sur sa personnalité, son histoire, son tempérament. Le public, désormais familier du lynchage médiatique, est sorti du clivage manichéen de l’affrontement  politique: une campagne n’oppose plus le bon et le mauvais. “Tous pourris” mais jusqu’où ? Tel pourrait se résumer la raison du succès outre-atlantique de l’Opposition Research…  En France, où sphères publique et privée se confondent de plus en plus, autant s’y préparer ! Libre adaptation par Céline Letellier de l’article (extrait) de Franck Confino paru dans La Lettre du Cadre territorial de février 2007 : “Politique et internet : les pires ennemis ?”. Voir aussi Versac : l’affaire de la vidéo de Ségolène Voir aussi Netpolique : “Souriez vous êts filmés” Vote des lecteurs sur blog-territorial.com Cliquez pour envoyer un commentaire audio

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4 pensées sur “L’Opposition Research, nouvelle arme politique ?

  • 22 juin 2007 à 1 h 37 min
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    Oui cette affaire avec Bourdieu était stupide, comme aujourd’hui celle qui tourne autour de l’amalgame soit disant "humoristique" Fillon/Staline…

    • 22 juin 2007 à 1 h 54 min
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      Pour tout dire, je découvre cette nouvelle affaire "Fillon/Staline" sur votre blog !

      C’est effectivement édifiant… et, comme l’affaire Bourdieu, même pas drôle. Tempête dans un verre d’eau ?

  • 22 juin 2007 à 1 h 38 min
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    Précision, je dis cela sans aucun parti pris politique, mais le blog ressemble parfois (souvent?) au café du Commerce

    • 22 juin 2007 à 2 h 02 min
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      Oui, c’est la même chose ! Maintenant, comme pour les cafés, il y a ceux du commerce mais aussi ceux des artistes, des écrivains, des philosophes etc… donc, selon moi, tout dépend du tenancier 🙂

      Quoi qu’il en soit, je suis ravi de voir que vous êtes revenu dans la blogosphère ! Après un blog très intéressant sur la communication territoriale arrêté un peu brutalement (comme beaucoup de blogs), longue vie à ces nouvelles pensées !

Commentaires fermés.