Créer une marque de territoire : entre l’adhésion et le rejet de la population

« Construire une stratégie de marque pour un territoire ». Lors de la conférence Cap’Com sur la communication publique et territoriale, un débat s’est ouvert : quel est l’intérêt de créer une marque pour un territoire ? Au delà de ce débat, ne s’agit t-il pas de faire adhérer la population à l’image de marque voulue par le territoire ?  La marque territoire, véritable atout ou dépense mal perçue en temps de crise pour la collectivité ?


Revenons sur ce qu’est la marque, « un signe distinctif qui permet au consommateur de distinguer le produit ou service d’une entreprise de ceux proposés par les entreprises concurrentes ». On parle donc d’une image de marque (la façon dont celle-ci est perçue par les consommateurs) et d’une identité de marque (la résultante dans l’esprit des consommateurs de l’ensemble des caractéristiques de la marque).
Pour Dominique Mégard, déléguée générale de Cap’ Com, la spécificité de la communication territoriale est  « celle d’abord portée par l’intérêt général, pour la promotion et le respect de la citoyenneté : portée par un souci d’écoute, de dialogue, elle intègre la notion de consultation, de débat public, de concertation, autrement dit une démarche tournée vers l’autre ».

La marque territoriale sert aussi à rapprocher les citoyens de ses institutions…

En pratique, cela implique donc que la marque se construise de jour en jour à partir des valeurs qui sont perçues et réaffirmées par la population. L’identification du citoyen avec son territoire entraînera une plus grande valorisation de celle-ci comme une responsabilité  sociale plus développée. De la même façon, l’élu pourra compter sur une « licence sociale » (soutien de la population pour les projets gérés par l’élu).

Le sujet est pour le moins dans l’air du temps. La région Bretagne a ainsi estimé nécessaire de développer sa marque. Le conseil régional a mis en place un logotype et un slogan qui pourront être utilisés et partagés par tous les ceux qui participent à l’attractivité de la région (entreprises, laboratoires de recherche, grandes écoles, etc.).

Autre exemple : Rive droite Bordeaux, lauréat du Cap Com d’or 2010 pour sa campagne de communication  « Vous aimez la Rive Droite, dites-le ! ». L’objectif de cette campagne : construire l’image de la Rive Droite avec ceux qui la font et la vivent au quotidien. Comment ? Par l’utilisation d’un label « Rive Droite : Grandeur nature », mais aussi par leur témoignage et leur rassemblement via Internet.
Des bonnes pratiques adoptées par les collectivités ? Oui. Mais à quel prix ? Aujourd’hui, il n’est plus suffisant de créer une marque. Il faut aussi la maintenir.
Malgré  l’enthousiasme que peuvent provoquer ces initiatives, la création de la marque peut également être mal perçue. Ainsi, pour la nouvelle marque de Pau, la mise en place du projet a été d’environ 87 000 euros. Selon un sondage sur Internet, 41,7% des internautes estimaient que la marque était chère et inutile, et 21,4% qu’elle était peu convaincante. Du côté de la défense : Martine Lignières-Cassou, député-maire, répliquait : « C’est tout à fait normal puisque c’est nouveau […]. C’est un choix volontairement non conventionnel. Il fallait que le logo soit repérable et que l’on montre notre distinction ».

Une marque peut être mal perçue par la population

Mais le cas de Pau n’est pas le seul : la région Alsace a confié une agence parisienne la réalisation de sa marque région. Coût de l’opération : 350 000 €. Un budget que les internautes trouvent démesuré, surtout en période de « restrictions budgétaires ». Pour le mouvement régionaliste Alsace d’Abord, « Une telle décision, même si l’agence retenue sera associée à un partenaire local, est un cruel message lancé aux entreprises alsaciennes qui payent ici impôts et taxes. Les 350 000 € de budget prévus s’envoleront vers la capitale ».
A première vue, cette somme d’argent semble un peu excessive, mais il faut analyser les vraies raisons qui justifieraient le coût de ce projet. L’agence parisienne a, en l’occurrence, une expertise dans le domaine, et peut justement apporter un œil extérieur, qui en fait toute sa pertinence. Pour déterminer ce qu’est la Bretagne d’aujourd’hui et ce qui unit les Bretons, elle a interrogé plus de 4000 personnes. Pour définir ce qu’est identité, ils ont réalisé plusieurs tables rondes et interviews en interrogeant 200 experts et acteurs du territoire.
Selon Alain Howiller : « La démarche engagée en Alsace sera du même ordre [que celle du Bretagne] : elle pourra prendre jusqu’à deux ans en quatre phases, […] la recherche des éléments d’identification. Puis arrivera la définition d’un «code de marque» (mots, couleurs), puis la mise en œuvre (comment l’utiliser au mieux) et, enfin, son exécution pratique sur le terrain avec quels moyens, quelles aides, quels partenariats ».

On doit reconnaître donc, que la création d’une marque territoriale a de réels atouts, à condition que la démarche implique tous les habitants de la communauté, dès la genèse du projet.

Une vraie campagne de communication doit être menée au préalable en informant la population sur les bénéfices de cette nouvelle image. De plus, il faut rappeler dans cette campagne que c’est la communauté elle-même qui a contribué à ce changement. Car la nouvelle image de marque doit être cohérente avec ce qui est ressenti par les locaux. Faire au préalable une campagne de sensibilisation sur la nécessité d’un changement d’image permettra d’éviter les suspicions et de diminuer les critiques futures.
Pour en savoir plus, écoutez l’interview de Georges Lewi sur radio CAP’COM.

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